Dans une interwiew à lagence italienne "Ansa", le nonce apostolique en Turquie a dénoncé une "christianophobie institutionnelle" dans ce pays laïc de culture musulmane où "la liberté religieuse "nexiste que sur le papier".
Les propos de Mgr Edmond Farhat, nonce apostolique à Ankara, font suite à la publication en Italie dun livre reprenant des textes sur lEurope du cardinal Joseph Ratzinger, devenu pape Benoît XVI, exprimant de fortes réticences à lentrée de la Turquie dans lUnion Européenne.
"En Turquie, pays qui se définit comme une démocratie laïque, la liberté religieuse nexiste que sur le papier", affirme le nonce apostolique, dorigine libanaise. "Elle est consacrée par la Constitution, mais dans les faits, elle nest pas appliquée". Mgr Farhat fait état de "réticences" et de "résistances" à la mise en oeuvre de cette liberté, "qui font penser à une stratégie pour ne pas accorder aux chrétiens la même liberté que celle dont jouissent les religions non chrétiennes en Europe".
"Il existe en Turquie une christianophobie institutionnelle pas très différente de celle qui existe dans lautres pays musulmans", estime-t-il encore.
Le représentant du Vatican cite notamment en exemple des accusations de "prosélytisme" portées contre des missionnaires protestants accusés "de menacer lunité de la nation turque", et rappelle que lEglise catholique demande depuis 1970 une reconnaissance juridique qui ne lui a toujours pas été accordée. Le patriarcat orthodoxe attend toujours que soit tenue la promesse de la réouverture de sa Faculté de théologie et les églises des paroisses se voient retarder sans date les possibilités de faire des réparations indispensables sur leurs églises. Il y a la "vitrine" européenne que sont Istanbul, et les sites "touristiques" mais il y a aussi ailleurs des communautés chrétiennes en grande difficulté.
"LUnion Européenne fait beaucoup pour la liberté religieuse en Turquie. Mais ce nest pas assez. Il faut poser la liberté religieuse non comme une condition, mais comme un droit", déclare Mgr Farhat.
Dans un texte du livre "LEurope de Benoît dans la crise des cultures", publié mardi en Italie, le futur Benoît XVI renouvelle ses réticences à lentrée de la Turquie dans lUnion européenne. "Il sagit dun Etat, ou peut-être mieux dun domaine culturel, qui na pas de racines chrétiennes, mais qui a été influencé par la culture islamique", écrivait alors le cardinal Ratzinger.
Le futur pape critiquait la thèse selon laquelle "tout État faisant siens les critères de la culture des Lumières et du laïcisme peut appartenir à lEurope".
Les textes publiés dans ce livre ne sont pas des inédits. Il sagit de conférences prononcées dans diverses circonstances ces dernières années, la plus récente étant le 1er avril, à la veille de la mort de Jean Paul II.
Alors quil était encore cardinal et préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi, Joseph Ratzinger avait pris position à plusieurs reprises dans le débat en Europe en se prononçant contre lintégration de la Turquie, quil qualifiait "dénorme erreur" et de décision "contre lhistoire".